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25 juin 2010 5 25 /06 /juin /2010 17:43

Biographie commentée de Charles de Gaulle

 

 


     Les instructions officielles nous demandent d’étudier une partie des Mémoires d’un homme qui peut être considéré comme un écrivain mais qui est avant tout un militaire, un homme politique et un chef d’Etat. Aussi est-il nécessaire d’inscrire l’étude du troisième tome des Mémoires de guerre, « Le Salut » dans l’ensemble de la vie de Charles de Gaulle :

Ø      Nous avons voulu prélever dans le foisonnement des événements ce qui relève des compétences et des actions de Charles de Gaulle et de celles de la France libre.

Ø      Cela peut permettre aux élèves de confronter la vision que l’auteur a de soi-même, de sa vie et des événements de son époque aux faits tels qu’ils peuvent être perçus par l’historiographie.

Ø      Il s’agit aussi de comprendre la cohérence du personnage, et les liens qui existent entre les différentes étapes de sa vie.

Ø      Cette biographie ouvre sur la profonde originalité des Mémoires de guerre dans la tradition mémorialiste française.

 

A l’image de Chateaubriand dont les Mémoires d’Outre-tombe montre trois carrières, celle du militaire, celle du diplomate et enfin celle de l’écrivain, on peut distinguer trois temps dans la vie de Charles de Gaulle : la période du militaire de carrière, celle du résistant, et enfin celle de l’homme d’Etat.

  • > Tout d’abord, on peut noter une profonde cohérence dans la vie de Charles de Gaulle, cohérence qui s’est toujours exprimée, quelque soit l’époque. Cette cohérence se retrouve d’ailleurs dans la formule gaullienne restée célèbre : « Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France ». On peut voir en effet chez Charles de Gaulle le souci constant d’une France qui doit être une entité nationale forte et indépendante, capable de faire entendre sa voix sur la scène internationale, et de s’imposer aux autres nations. C’est sans doute dans les affres de la première guerre mondiale que Charles de Gaulle a pu se forger cet idéal qu’il n’a cessé ensuite de défendre : ses écrits militaires durant l’entre-deux guerres sur la nécessité d’une armée de métier, ses efforts pour imposer aux autres nations la reconnaissance de « La France libre », sa volonté de faire participer la France au concert des nations d’après-guerre, ses prises de position vis-à-vis du gouvernement américain tant sur la situation en Europe que par la suite durant la guerre du Vietnam, sa décision de retirer la France du système de l’Otan, en font foi. Il est important de voir dans le troisième tome des Mémoires de guerre comment s’exprime ce souci de l’indépendance et de l’autorité françaises : comment l’auteur présente-t-il la nation française ? comment les relations de la France avec les autres nations sont-elles présentées ? comment les Mémoires construisent-ils le mythe d’une France puissante et indépendante ([ retravail de l’Histoire, manipulation des données historiques, jeu de la narration…) ?
  • > A ce destin de la France se lie un autre destin : le sien propre. De Gaulle manifeste une certaine idée de soi, qui se traduira par un destin national. Destin de la France et destin personnel sont ainsi étroitement liés et même consubstantiels. C’est pourquoi ce militaire de carrière présente toujours une volonté d’indépendance même vis-à-vis de sa hiérarchie, qui l’amène dans l’entre-deux guerres à présenter des théories militaires originales et à partir pour Londres le 17 juin 1940, alors que le maréchal Pétain vient de demander l’armistice à l’Allemagne.
  • > Cela amène à la profonde originalité des Mémoires dans la tradition mémorialiste française (qui s’explique aussi bien par la personnalité de Charles de Gaulle que par le fait qu’il n’est pas au départ un écrivain) : alors que la tradition mémorialiste française est dominée, depuis Montaigne au moins, par l’affirmation de plus en plus forte du moi de l’écrivain, perçu dans sa vie quotidienne, ses sentiments, ses impressions, ses qualités et ses travers, nul épanchement personnel chez de Gaulle. Les Mémoires  sont en permanence l’œuvre d’un homme public. Pas d’autobiographie dans ces Mémoires qui sont consacrés au destin national de la personne de l’auteur et à la vision personnelle du destin de la nation. Ce Je national permet de donner une vision unique et originale de la France et devient au besoin un il quand il s’agit de la personne de l’auteur. A ce titre, le propos est volontiers fondateur et la vision originale peut devenir originelle. A tel point que les Mémoires sont aussi une part active de l’engagement politique et étatique de Charles de Gaulle, lors de la parution du troisième tome en 1958. Il faudra à ce titre étudier le double processus de personnification de la France et de nationalisation du je auctorial, le travail sur la figure du narrateur-personnage, les mises en scène de soi (et les différentes postures de l’auteur), le jeu des points de vue, l’usage des pronoms, celui de la mimesis formelle…

 

 

Un militaire de carrière mais qui affirme sa personnalité

 

Ø      1890, 22 novembre : naissance de Charles de Gaulle à Lille.

Ø      1909 : entre à l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr.

 

Ø      1914, 15 août : lieutenant, Charles de Gaulle est blessé sur le pont de Dinant, puis évacué jusqu’en décembre.

Ø      1916, 2 mars : Promu capitaine, de Gaulle est blessé à Douaumont. Il est fait prisonnier.

Ø      De 1916 à 1918, emprisonné en Allemagne, il tente cinq évasions, mais ne rentrera que le 3 décembre 1918.

 

Ø      1919-1920 : affecté en Pologne, pour soutenir l’armée polonaise.

Ø      1921-1939 : de Gaulle entre à l’Ecole supérieure de guerre, puis fait partie de l’état-major du maréchal Pétain, et part en mission à Beyrouth. Il rédige également plusieurs ouvrages. Il y développe ses théories militaires sur la nécessité d’un corps de blindés et la création d’une armée de métier.

 

Ø      1939, 2 septembre : commande les chars de la 5e armée.

Ø      1940, 26 avril : commandant par intérim de la 4e division cuirassée de réserve.

Ø      17-31 mai : combat à Montcornet, Crécy et Abbeville.

Ø      23 mai : général de brigade à titre temporaire.

Ø      5 juin : sous-secrétaire d’Etat, chargé de la Défense nationale et de la Guerre.

Ø      17 juin : alors que le maréchal Pétain demande l’armistice à l’Allemagne, de Gaulle quitte Bordeaux pour l’Angleterre avec son aide de camp, Geoffroy de Courcel.

 

Un résistant qui entend imposer une « France libre » et se veut un destin national

 

Ø      18 juin : de Gaulle lance un appel à la Résistance sur les ondes de la BBC.

Ø      28 juin : de Gaulle est reconnu chef des Français libres par le gouvernement britannique. Les Forces françaises libres sont organisées par le général de Gaulle en réaction contre l’armistice et pour poursuivre la lutte auprès des Alliés. Elles sont composées de toutes les formations militaires ayant fui la France. Leurs effectifs sont d’environ 7000 hommes dont 500 aviateurs dirigés par l’amiral Muselier.

Ø      22 août : Il est condamné à mort par contumace par un tribunal militaire à Vichy.

Ø      9 septembre : les comptoirs français de l’Inde se rallient à la France libre.

Ø      24 septembre : ralliement de la Nouvelle-Calédonie à la France libre.

Ø      25 septembre : La tentative de débarquement à Dakar des forces de la France libre, sous la direction du général de Gaulle et avec l’appui des Britanniques, est abandonnée.

Ø      27 octobre : manifeste de Brazzaville. Occupation du Gabon par les Forces françaises libres. Le général de Gaulle, qui a perdu de son prestige depuis l’échec de Dakar, mais qui sait pouvoir compter sur les colonies, crée à Londres le Conseil de défense de l’Empire, embryon de son gouvernement.

Ø      12 novembre : Afrique équatoriale française : Félix Eboué est nommé gouverneur par le général de Gaulle.

Ø      25 décembre : Création officielle du premier groupe d’aviation de la France libre.

 

Ø      1941

Ø      2 mars : en Libye, les FFL, commandées par le colonel Leclerc, ont vaincu les Italiens à Koufra.

Ø      24 septembre : création du Comité national français.

Ø      26 septembre : reconnaissance de la France libre par l’URSS.

Ø      8 décembre : la France libre déclare la guerre au Japon.

 

Ø      1942

Ø      1er janvier : sur l’ordre de de Gaulle, Jean Moulin est parachuté en France pour réorganiser les mouvements de résistance.

Ø      10 juin : Les FFL dirigées par la général Koenig quittent Bir Hakeim.

Ø      9 juillet : les Etats-Unis reconnaissent à leur tour le Comité national français.

 

Ø      1943

Ø      14 janvier : Roosevelt et Churchill se rencontrent, en présence du général de Gaulle, à Casablanca, pour évoquer les futurs débarquements et la reddition de l’Allemagne, du Japon et de l’Italie.

Ø      27 mai : première réunion du Conseil national de la Résistance (CNR). Il est alors présidé par Jean Moulin et reconnaît l’autorité du général de Gaulle.

Ø      31 mai : arrivée du général de Gaulle à Alger.

Ø      3 juin : création du Comité français de la Libération nationale (CFLN) sous la coprésidence de de Gaulle et Giraud, fusion du gouvernement d’Alger et de celui de la France libre, à Londres. Le général Catroux est nommé gouverneur général de l’Algérie et l’amiral Muselier devient l’adjoint de Giraud.

Ø      21 juin : arrestation de Jean Moulin à Caluire.

Ø      juillet : resté à Alger, de Gaulle transforme les cérémonies du 14 juillet en véritable investiture personnelle. La flotte française de l’amiral Robert a été récupérée par la général de Gaulle ainsi que l’or de la Banque de France, caché à Fort-de-France, qui a été rapatrié à Alger. L’influence gaulliste grandi, soutenue par un secrétariat, confié à MM. Joxe et Faure, un comité juridique dirigé par René Cassin et un secrétariat militaire.

Ø      26 août : les alliés reconnaissent le CFLN, qui devient un véritable gouvernement provisoire de la France.

Ø      17 septembre : le général de Gaulle crée, à Alger, une Assemblée consultative provisoire qui donnera au CFLN la forme d’un gouvernement provisoire. Elle est composée des représentants des mouvements unifiés de la Résistance et de ceux des partis de la Troisième République.

Ø      9 novembre : de Gaulle prend seul la tête du CFLN. Il déclare, le 12 novembre, lors de la première session de l’Assemblée consultative provisoire : « Cette réunion est, en effet, ni plus ni moins qu’un début de résurrection des institutions représentatives françaises ».

 

Ø      1944

Ø      24 janvier – 2 février : conférence de Brazzaville. Le général de Gaulle décide le rassemblement de toutes les forces de la Résistance sous le nom de FFI, Forces françaises de l’Intérieur.

Ø      3 juin : le CFLN devient le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF).

Ø      25 août : retourné définitivement en France le 20 août, de Gaulle prononce le discours de l’hôtel de ville après la libération de Paris.

Ø      26 août : descente des Champs-Elysées.

Ø      23 octobre : la conférence des Quatre Grands sur l’ONU consacre la reconnaissance officielle du gouvernement du général de Gaulle. Le gouvernement d’Union nationale formé six semaines auparavant regroupe aussi bien des communistes que la Fédération républicaine. Le danger de la guerre civile par exécutions sommaires est très grave.

Ø      7 novembre : de Gaulle réclame une zone française d’occupation en Allemagne.

 

Un chef d’Etat soucieux de l’indépendance de la France

 

Ø      1945

Ø      4 février : ouverture de la conférence de Yalta, où la France n’a pas été invitée.

Ø      21 octobre : élections générales et référendum sur la nature de l’Assemblée élue (constituante).

Ø      13 novembre : de Gaulle est élu à l’unanimité président du GPRF par l’Assemblée nationale. Il forme un gouvernement tripartite MRP-SFIO-PCF.

Ø      2 décembre : de Gaulle nationalise le crédit et le 26 décembre, le franc est dévalué de 66 %.

 

Ø      1946

Ø      20 janvier : de Gaulle démissionne du gouvernement.

Ø      16 juin : discours de Bayeux où de Gaulle précise ce qu’il attend pour une nouvelle Constitution.

 

Ø      1947, 7 avril : de Gaulle crée le Rassemblement du Peuple français.

 

Ø      1952

Ø      27 mai : signature à Paris du traité de Communauté européenne de défense. De Gaulle et le RPF manifestent leur opposition.

 

Ø      1958

Ø      15 mai : de Gaulle se dit prêt à assumer les charges du pouvoir.

Ø      29 mai : Après la démission du gouvernement Pflimlin, la veille, de Gaulle est appelé à la présidence du Conseil par le président de la République, René Coty.

Ø      1er juin : de Gaulle est investi président du Conseil par l’Assemblée nationale qui lui accorde les pleins pouvoirs et le charge de faire une réforme constitutionnelle.

Ø      26-28 septembre : la nouvelle constitution est soumise à référendum et approuvée par 80 °/o des Français.

Ø      21 décembre : de Gaulle est élu président de la République française et de la Communauté africaine et malgache.

 

Ø      1959, 16 septembre : de Gaulle annonce le principe de l’autodétermination pour la politique algérienne.

 

Ø      1960, juillet-août : indépendance des Etats de la Communauté africaine et malgache.

 

Ø      1961, 23 avril : après le putsch des généraux à Alger la veille, l’article 16 de la Constitution sur les pleins pouvoirs est mis en œuvre.

Ø      8 septembre : attentat manqué de Pont-de-Seine.

 

Ø      1962, 7-18 mars : rencontre d’Evian entre Français et FLN aboutissant à l’indépendance de l’Algérie.

Ø      22 août : attentat manqué du Petit-Clamart.

 

Ø      1965, 19 décembre : de Gaulle est élu président de la République au second tour, contre François Mitterand.

 

Ø      1966

Ø      8 janvier : composition du nouveau gouvernement de Georges Pompidou.

Ø      7 mars : la France se retire du système intégré de l’OTAN.

Ø      1er septembre : discours de Phnom Penh dans lequel il demande la neutralité des Etats-Unis à l’égard de la péninsule indochinoise.

 

Ø      1968

Ø      30 mai : de Gaulle annonce la dissolution de l’Assemblée nationale.

 

Ø      1969

Ø      27 avril : échec du référendum sur la réforme du Sénat et la régionalisation.

Ø      28 avril : démission de de Gaulle.

 

Ø      1970

Ø      9 novembre : mort de de Gaulle.

Ø      12 novembre : obsèques du Général à Colombey-les-deux-Eglises.

 

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19 juin 2010 6 19 /06 /juin /2010 17:38

L’oral de rattrapage

 

 

 

Bonjour à toutes et à tous. J'espère que les écrits se sont bien passés et que vous n'aurez pas besoin d'aller à l'oral. Pour celles et ceux qui auraient quand-même comme un doute, voici une présentation de l'oral de rattrapage. Bon courage à tous. N'hésitez pas si vous avez des questions. 

 


 

L’oral de rattrapage est réservé à ceux qui ont entre 08 et 10 de moyenne. Ces candidats doivent choisir deux matières pour le rattrapage. Il est préférable de choisir une matière avec un fort coefficient, ou une matière dans laquelle on a eu une très mauvaise note : dans ces deux cas, en effet, on peut rattraper beaucoup de points.

 

[ Conseil : commencer à réviser dès la fin des épreuves écrites. En effet, il y a très peu de temps entre la réception des résultats et les épreuves orales.

 

Ø      Temps de préparation : 20 min.

Ø      Temps de passage : 20 min.

 

Pour la littérature :

 

L’examinateur vous donne une question portant sur le programme de lettres. Cette question peut porter soit sur un aspect particulier de l’une des œuvres, soit sur l’ensemble d’une œuvre en relation avec l’objet d’étude, soit sur un point de comparaison entre plusieurs des œuvres au programme.

Sur cette question, le candidat doit construire, durant les 20 min de préparation, un exposé de façon organisée, argumentée et illustrée d’une étude précise de l’œuvre.

 

Cet exposé doit tenir à l’oral 10 min.

L’exposé de 10 min. est suivi d’un entretien de 10 min environ. Durant cet entretien, l’examinateur part de l’exposé, invite à préciser un propos, à approfondir la réflexion, à développer des perspectives.

 

La question des œuvres : en principe, en littérature, vous n’avez pas le droit aux œuvres. Cependant, comme dans les années passées, il y a parfois eu de divergences selon les académies, je vous conseille fortement d’amener avec vous les œuvres et de demander poliment à l’examinateur si vous y avez droit ou pas. Cependant, ne comptez pas trop sur ces œuvres, car même si vous y aviez droit, vous n’auriez pas le temps de les consulter et en tourner fébrilement les pages ne pourrait que vous retarder encore. Apprenez donc des citations qui peuvent servir pour plusieurs questions différentes !

 

[ Critères d’évaluation :

 

Ø      Connaissance des œuvres et des objets d’étude

Ø      Aptitude à prendre en compte une problématique

Ø      Clarté, pertinence et cohérence du propos

Ø      Utilisation de notes personnelles

Ø      Personnalité de l’interprétation et du jugement critique

Ø      Aptitude au dialogue, à l’échange

Ø      Justesse et correction de l’expression orale

 

[ Conseils :

v     Il faut apprendre à gérer son temps de parole : prenez une montre (les portables sont bien sûr interdits) et mettez la à côté de vous sur la table. Vous pourrez ainsi la consulter et adapter votre débit et votre propos au temps restant.

v     A partir de la question, analysez-la et proposez une problématique. Vérifiez que cette problématique n’est pas hors-sujet par rapport à la question.

v     En 20 min., vous n’avez pas le temps de rédiger vos notes : faites un plan détaillé.

v     Votre exposé doit comporter une introduction (même méthode qu’à l’écrit), un développement en deux ou trois parties distinctes avec des entrées analytiques, et une conclusion (même méthode qu’à l’écrit).

v     Durant l’exposé, pensez à regarder votre examinateur, car vous êtes aussi jugé sur votre capacité au dialogue et à l’échange.

v     Durant l’entretien, soyez attentif aux questions et justifiez toujours votre propos : aucune question n’appelle une simple réponse oui ou non.

v     Soyez ouvert et capable durant l’entretien de remettre en question votre jugement, sans pour autant aller jusqu’à dire tout et son contraire.

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19 juin 2010 6 19 /06 /juin /2010 13:15

Voici le programme de littérature tel qu'il a été défini par le BO pour l'année 2010-2011 :

 

A. Domaine : Grands modèles littéraires - Modèles antiques

Œuvre : « L'Odyssée » d'Homère (Chants V à XIII), traduction Philippe Jaccottet, édition FM/La Découverte.
B. Domaine : Langage verbal et images - Littérature et cinéma
Œuvre : « Tous les matins du monde » de Pascal Quignard.
Film : « Tous les matins du monde » d'Alain Corneau.
Les établissements scolaires se procureront le DVD du film « Tous les matins du monde » (référence n° 120108) auprès des Ateliers de diffusion audiovisuelle (ADAV), 41, rue des Envierges, 75020 Paris contact@adav-assoc.com. Le coût du DVD est de 54,18 euros par exemplaire, frais de port inclus, comprenant les droits de diffusion pour un usage scolaire pour les deux années d'application du programme.
C. Domaine : Littérature et débats d'idées - Littérature et histoire
Œuvre : « Mémoires de guerre », tome III, « Le Salut, 1944-1946 », Charles de Gaulle.
D. Domaine : Littérature contemporaine - Œuvres contemporaines françaises ou de langue française
Œuvre : « Fin de partie » de Samuel Beckett.
On peut regretter la partition très marquée de ce programme qui laisse un vide immense entre une oeuvre de l'Antiquité grecque et....le XXe siècle ! Tâchons de compenser en insistant sur le XVIIe siècle à l'occasion de Tous les matins du monde. Toutefois, alors qu'officiellement, on veut revaloriser la filière lettres et offrir aux élèves une vraie culture littéraire, ce vide est pour le moins problématique.
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16 juin 2010 3 16 /06 /juin /2010 19:19

« Une charogne »

Les Fleurs du Mal

Baudelaire

 

Bonsoir à tous. Enfin, j’ai fini ma charogne ! Hum… J’avoue que j’ai vraiment eu du mal mais j’espère que ce qui suit sera clair. Certes, le contenu est moins universitaire que ce que vous a fait Mme DGDN. Mon contenu est plus scolaire. J’espère en tout cas qu’il vous aidera. N’hésitez pas à poser des question via les commentaires (soyez courtois). Bonnes révisions à tous et bonnes vacances !

 

Baudelaire travaille ici une forme poétique qui est déjà un topos littéraire : la déclaration d’amour à la femme aimée sous la forme d’une vanité. Ce motif a été très utilisé par les poètes de la Pléiade (Humanisme du XVIe siècle, Renaissance). Ainsi, on peut immédiatement songer à l’intertexte de Ronsard, « Ode à Cassandre » dans Les Amours, deuxième édition de 1553, dont voici le texte :

 

Mignonne, allons voir si la rose

Qui ce matin avait déclose

Sa robe de pourpre au soleil

A point perdu cette vêprée

Les plis de sa robe pourprée,

Et son teint au vôtre pareil.

 

Las ! voyez comme en peu d’espace,

Mignonne, elle a dessus la place

Las, las, ses beautés laissé choir !

O vraiment marâtre Nature,

Puisqu’une telle fleur ne dure

Que du matin jusques au soir !

 

Donc, si vous me croyez, mignonne,

Tandis que votre âge fleuronne

En sa plus verte nouveauté,

Cueillez, cueillez votre jeunesse :

Comme à cette fleur, la vieillesse

Fera ternir votre beauté.

 

Dans ce poème comme dans celui de Baudelaire, le mouvement du texte est le même ainsi que, en apparence, le propos. En effet, dans un premier temps, le poète présente l’objet de sa vision, ici la fleur, dont il suppose toute la splendeur. De même, au début du texte de Baudelaire, la carcasse a l’air « superbe » (v.13), et est présentée dans un cadre bucolique (de nature). Puis, le poète constate la dégradation de la fleur ou de la charogne et dans un dernier temps s’adresse à la femme aimée pour la mettre en garde contre le temps qui passe et faire de l’objet observé le miroir de cette femme destinée, comme tout être, à mourir. Ainsi, le propos semble le même : la femme aimée doit voir sa propre image future dans la décomposition de la nature : c’est le principe de la Vanité (le spectacle du monde n’est montré que pour mieux faire apparaître le néant à l’œuvre, la mort qui vient inévitablement (cf. portrait de Mme de Restaud dans Gobseck).

> On peut diviser le texte en différentes parties :

- v.1- 4 : adresse à la femme aimée et contexte du souvenir invoqué

- v.5-16 : description de la charogne, méliorative malgré le spectacle répugnant

- v.17-24 : perte d’unité de la charogne par les larves

- v.25-36 : décomposition de la charogne

- v.37-48 : adresse à la femme aimée promise à même mort et même décomposition

 

Cependant, vous pouvez remarquer immédiatement que Baudelaire utilise un topos en le poussant à bout : ce n’est plus une rose déflorée que l’on voit mais une charogne ! Ainsi, le topos est partiellement détourné[1] : le beau même décomposé laisse place au laid, au répugnant, à l’horrible. Ainsi, Baudelaire substitue à la célébration de la beauté éphémère de la rose et de la femme, la célébration du laid, de l’horrible, de ce qui est mort. Ainsi, Baudelaire pose la question du beau dans l’art : l’art doit-il nécessairement célébrer la beauté ? Peut-on célébrer le laid avec une forme belle ? [ On pourra ainsi se demander comment Baudelaire détourne le topos littéraire de l’adresse à la femme aimée dans une vanité pour se livrer à une célébration paradoxale du laid, du répugnant et du mort (de la mort ?).

 

I – De la vanité à la description macabre

 

La vanité est un type de tableau très courant au XVIe siècle dans la peinture baroque. Son propos est moral : il s’agit de rappeler à celui qui regarde qu’il doit mourir et ne sera bientôt plus rien, quels qu’aient été ses biens et sa puissance durant sa vie. Ce message est résumé par la formule latine : memento mori, souviens-toi que tu vas mourir. Si les vanités présentent souvent des objets agréables au regard : fleurs épanouies, instruments de musique, jeune fille, hommes riches et puissants, ces peintures glissent également dans leur représentation des éléments qui rappellent la mort : sablier, faux, crâne…

 

1.1 ) L’inscription de la charogne dans un cadre bucolique

 

Ici, la première strophe du poème peint tout d’abord un décor bucolique, positif, parcouru par le poète et la femme aimée. Ainsi, le poète insiste sur le caractère paisible et agréable du cadre – « beau matin d’été si doux » (adverbe d’intensité et adjectif valorisant), « lit semé de cailloux » - qui réserve au promeneur des surprises pour la vue – « au détour d’un sentier ». On a d’emblée le thème, très courant en poésie, de la promenade amoureuse évoquée par le terme « sentier ». Au vers 13, on retrouve l’importance de la nature : « le ciel regardait » - la personnification semble indiquer une concordance entre les personnages et l’attitude du monde tout entier. De même, des vers 24 à 28, le monde des larves est comparé dans ses mouvements et ses bruits au geste du vanneur : « comme […] le grain qu’un vanneur d’un mouvement rythmique / Agite et tourne dans son van ». Dans le poème, on a également une comparaison avec une fleur, v.14, l’ « eau courante et le vent », v.26. Le poète parle des « rochers », v.33 et reprend le motif de « l’herbe et les floraisons grasses », v.43.

Dans la première strophe, ce n’est qu’au troisième vers que le poète révèle le thème exact de son discours ménageant ainsi l’effet de surprise et le contraste avec l’attente du lecteur programmée par le terme « objet » qui semble être positif puisqu’il permet l’union entre le poète et la femme aimée : « Rappelez-vous l’objet que nous vîmes, mon âme » : cet objet fait partie de l’expérience commune du poète et de la femme. Le marqueur temporel précis « ce beau matin d’été » semble indiquer de plus une trouvaille importante pour le couple, digne de rester dans leur mémoire. Ce n’est d’ailleurs qu’à la quatrième strophe que le poète réécrit cette rencontre et le lien qui s’est alors créé sur le mode…de l’évanouissement face à la puanteur de la charogne ! Dans les vers 15 à 16, l’enjambement permet ainsi de glisser du topos romantique de la femme aimée au sein de la nature « sur l’herbe » à l’évanouissement et au malaise !

 

1.2 ) La description macabre

 

Le texte glisse progressivement vers une vision toujours plus affreuse et écoeurante de l’ « objet », dans un effet de gradation. Ainsi, l’expression « charogne infâme » au vers 3 programme la suite du poème par l’effet de surprise qu’elle provoque. Cependant, l’expression reste assez vague et la précision de la description réaliste qui suit vient lui donner de l’épaisseur :

 

a ) La personnification (vers 5-8)

La deuxième strophe présente paradoxalement la charogne comme une chair vivante. A travers la comparaison avec une prostituée au vers 5, l’usage de verbes d’action – « suant », « ouvrait », ainsi qu’à travers la personnification – « le ventre en l’air […] d’une façon nonchalante et cynique », la charogne est présentée dans une posture associant l’érotique (la charogne exhibe ses entrailles comme une femme son sexe) et le macabre.

 

b ) La description réaliste (v.9-16)

 

Certains termes de la deuxième strophe, faisant appel à l’odorat ou au toucher – « suant les poisons », « plein d’exhalaisons » - préparent ainsi la troisième strophe avec l’image de la cuisson des chairs au soleil. La dégradation de l’image est rendue dans la troisième strophe par l’opposition de registres de langue entre « le soleil rayonnait » qui appartient au grand style et « la cuire à point » qui tranche par son prosaïsme et son style familier. La quatrième strophe produit le même effet de surprise par le contraste entre la description méliorative du monde : « et le ciel regardait », « superbe », « comme une fleur s’épanouir » et les vers 15 et 16 indiquant la puanteur de la charogne. L’horreur de la vision est renforcée par la vision de la perception de la femme : « vous crûtes vous évanouir ».

 

1.3 ) De la perte d’unité à la disparition de la charogne

 

Dans les strophes 5 et 6, le poète s’attache à montrer la perte d’unité de la charogne : en fait, ce que l’on pouvait encore voir dans les strophes précédentes disparaît sous le grouillement des larves : métaphore guerrière des armées de larmes – « noirs bataillions / De larves » (l’horreur est soulignée par le rejet)-, comparaison avec l’eau : « qui coulaient comme un épais liquide », « comme une vague », verbes de mouvements – « descendait, montait », « s’élançait ». Le nombre exubérant de larves est encore renforcé au vers 21 par la reprise « tout cela » et au vers 25 par « ce monde ». Avec ironie, le poète montre la carcasse reprenant un aspect vivant, traversée par la vermine : « vivants haillons » - (une) hypallage : figure de style qui consiste à rapporter à certains mots d’un énoncé ce qui devrait logiquement être attribués à d’autres - , « enflé d’un souffle vague », « vivaient en se multipliant ».

Dans les vers 29 à 36, le poète présente la disparition progressive de la charogne rendue par l’usage de l’imparfait à valeur durative : « Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve ».  Le poète utilise la métaphore de l’ébauche de la peinture, qui sera à interpréter. Les chairs que l’on voyait encore puis qui étaient ensevelies sous les larves ont désormais disparu pour laisser place au « squelette », v.35.

 

Ainsi, quoique le poète présente une découverte soudaine, dont la temporalité est précise, c’est la décomposition progressive de la charogne que l’on voit. Baudelaire use des effets réalistes, de la personnification et des effets de surprise pour rendre visible cette charogne. Le texte se fait même visionnaire et dépasse le simple réalisme pour créer une hallucination, une vision onirique (les armées de larves dévorant le cadavre). Baudelaire rompt ainsi avec la tradition poétique en mettant au cœur de son poème non pas la femme aimée comme le faisait Ronsard, mais la charogne elle-même, vision d’horreur. Ainsi, l’ironie est visible, tant dans l’adresse à la femme aimée que dans le propos sur la nature.

 

II – Une déclaration d’amour…ironique ?

 

2.1 ) Un couple uni ?

 

Le poème débute par l’inscription du couple : le poète s’adresse directement à elle par l’emploi de « vous », l’appel au souvenir commun – « rappelez-vous l’objet que nous vîmes » et l’exhortation – « dites », v.45. La femme est également désignée dans le poème de façon méliorative : « mon âme » (v.1), « étoile de mes yeux, soleil de ma nature » (v.39), « Vous, mon ange et ma passion » (v.40), « ô la reine des grâce » (v.41), « ô ma beauté » (v.45). On voit dans ces citations l’usage de la métaphore des astres mise en valeur par le parallélisme de construction. L’usage du pronom personnel « nous » et l’adjectif possessif « mon » ou « ma » associé à des termes comme « passion » (diérèse au vers 40) montre un lien affectif exclusif.

 

2.2 ) L’ironie à l’égard de stéréotype amoureux

 

Cependant, cette figure féminine est trop curieusement associée à la charogne pour que sa vision ne soit pas ironique. Ainsi, au vers 37, le poète compare cette femme à la charogne en ravalant la femme au rang d’ordure : « et pourtant vous serez semblable à cette ordure ». Dès lors les vers 39 et 40 ne peuvent s’entendre que sur le mode ironique, d’autant plus que « passion » est lié à « infection » par la rime et même par la diérèse, dans chaque cas. Dans les vers 41 à 44, la poète insiste sur l’antithèse entre « reine des grâces » et « moisir parmi les ossements ». Dans la dernière strophe, on observe un glissement du motif de l’amour à celui de la mort, d’Eros à Thanatos, puisque ce sont désormais les vers qui embrasse la femme aimée. De fait, l’amour lui-même semble mort dans le dernier vers : « de mes amours décomposés ! ». En réalité, l’adresse à la femme aimée, suit, dans les trois dernières strophes le mouvement de dégradation que l’on avait déjà dans les strophes consacrées à la charogne : la femme devient semblable à l’ « infection », puis disparaît sous terre, dévorée par la vermine.

 

Ces éléments montrent l’aspect parodique de la déclaration d’amour à la femme. La poésie humaniste sublime la beauté de la femme ; mais ici, le poète la assène cruellement sa fin prochaine et sa décomposition !  L’ironie montre cependant une réflexion sur l’art poétique.

 

III – L’ironie à l’égard du spectacle de la nature et une réflexion sur l’acte poétique

 

3.1 ) L’ironie à l’égard des clichés poétiques

 

L’ironie à l’égard des poèmes dédiés à la femme aimée sous forme de Vanités est perceptible dans les brusques changements de registre de langue et de style : on passe ainsi assez systématiquement d’un style élevé et noble à un style bas, qui donne dans le vulgaire au vers 3, dans l’érotique, dans la deuxième strophe, dans le prosaïque au vers 10, dans l’horrible aux vers 15 et 16. A chaque fois, ces changements provoquent un effet de surprise mais aussi un effet déceptif au regard des attentes du lecteur devant la description méliorative de la nature et le thème du couple. De même, comment ne pas voir une distance ironique dans la complaisance avec laquelle le poète décrit la charogne, usant d’un luxe douteux de détails dans la deuxième strophe et d’une description horriblement enthousiaste dans les vers 17 à 24 : on frôle ainsi la vision épique (frôle seulement, ne faites pas de la strophe 5 un combat !) et son caractère onirique est particulièrement fort. De même, Baudelaire joue sur les clichés poétiques : la célébration de la Nature (que l’on retrouve sans ironie dans le poème « Correspondances » des Fleurs du Mal) qui ici devient un agent de pourrissement (v.11-12), la vision du corps et de l’âme, du corps animé par le souffle de l’esprit, thème romantique et emprunté à la Bible : dans les vers 23-24, le souffle devient…le mouvement des vers ! Le poète reprend aussi la célébration du mouvement et de la musique du monde, sauf que cette musique, aux vers 25-26 est celle des larves. Enfin, Baudelaire reprend l’image de la disparition, de l’anéantissement dans la mort ou l’oubli, au vers 29 mais en fait une disparition par dévoration des vers…Cette mise à distance permanente montre que Baudelaire réfléchit ici à son art, à ce qu’est l’acte poétique, et à la question de la beauté en art.

 

3.2 ) La réflexion sur l’acte poétique et sur la beauté

 

Le poète donne un indice explicite de cette réflexion sur l’art et la beauté : aux vers 29-32, la charogne est en effet comparée à l’œuvre inachevée d’un peintre : « rêve », « ébauche lente à venir », « sur la toile oubliée », « que l’artiste achève », « seulement par le souvenir ». La charogne est donc l’œuvre de la Nature, œuvre que le poète reproduit par son art. Le poème célèbre d’ailleurs l’acte créateur par la permanence que celui-ci suppose chez le créateur : à l’image de la Nature, le poète a une permanence, échappe pour une part au temps et à la mort et est capable de fixer la vie éphémère dans l’éternité : « j’ai gardé la forme et l’essence divine / De mes amours décomposés » (v.47-48). Il s’oppose donc à la condition de la femme mortelle. Le poète, par son art, est présenté comme un être supérieur, comparable à Dieu : il garde de ses amours l’ « essence divine » dont l’adjectif s’oppose de façon provocante à « vermine » (à la mort) : v.45 et 48. La réflexion sur l’art s’approfondit avec l’interrogation sur l’acte de représentation du monde réel. Un poète peut-il tout décrire ? Doit-il se cantonner à des choses belles ? Baudelaire montre que la beauté en art vient non pas de l’objet mais du travail de métamorphose que la forme du texte fait subir au réel. Ainsi, la beauté peut naître comme ici du laid, de l’horrible, de l’écoeurant (à retenir si dissertation sur la poésie ou question à l’oral : qu’est-ce que la poésie ?). De même, Baudelaire dissocie la réussite littéraire et toute intention moralisante : la puissance de l’évocation vient également de la célébration de toute forme du Mal (pornographie, mort…).

 

3.3 ) Réflexion sur le motif poétique du carpe diem

 

Ainsi, Baudelaire renverse le motif du carpe diem présent dans les vanités : comme dans le poème de Ronsard (mais le motif remonte à Pétrarque), les vanités soulignent le caractère éphémère de la vie et de la beauté et invite la femme à cueillir le jour pendant qu’il en est encore temps, à profiter du temps présent. Or, ici, le message final s’inverse puisque la femme est perdue corps et âme mais que le poète a réussi à prélever la quintessence de leur amour et à lui donner une forme éternelle. On aboutit à une célébration paradoxale de la mort, à travers la description enthousiaste de la charogne et l’adresse à la femme aimée. Baudelaire utilise tout d’abord le thème baroque de la métamorphose : la mort, par le retour à la Nature, permet de nouvelles formes de vie : comparaison avec la fleur qui s’épanouit, v.14, et mouvement des larves (§ 5 et 6). Le poète insiste sur la symbiose entre des éléments différents : l’eau, l’air, le feu (avec la cuisson) et la terre. Mais ici, le thème du memento mori (« souviens-toi que tu vas mourir ») ne donne pas lieu à une déploration comme chez Ronsard (répétition de « las ! ») mais à une célébration paradoxale : modalité exclamative, futur de certitude, image de l’amour au sein de la mort : « qui vous mangera de baisers » (v.46 : souvenir de Shakespeare qui utilise cette image à propos de Juliette dans la pièce Roméo et Juliette ?). Ce n’est plus Eros que le poète célèbre mais bien la conversion d’Eros en Thanatos. Les deux ne sont plus opposés mais réunis.

 

 

Baudelaire manifeste ici la volonté de choquer le lecteur, mais aussi de le faire réfléchir à son horizon d’attente : le discours traditionnel sur la mort et le temps qui passe est ici détourné et les attentes du lecteur sont déçues. Toute la force de Baudelaire est ici de renouveler un topos littéraire.

Dans l’usage du laid pour faire du beau, il y a aussi un manifeste de modernité : Baudelaire part de l’horreur, de l’écoeurant, du laid pour en faire du beau par l’alchimie du poème : « tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or ». Ici, Baudelaire insiste sur l’immortalité du poète qui a su capter les formes de l’Idéal même dans l’horrible ou l’éphémère.

 



[1] On voit déjà un jeu dans la forme du texte : alternance d’alexandrins (utilisés dans la poésie classique (XVIIe isècle) pour traiter de sujets graves, sérieux) et d’octosyllabes (qui donnent un aspect plus léger au texte).

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14 juin 2010 1 14 /06 /juin /2010 20:53

Bonsoir M. Voici un plan détaillé qui j'espère permettra de clarifier la question. Je n'ai pas trouvé l'intitulé exact de la question mais ce qui suit est une étude qui fait à peu près le tour du thème. Bonne lecture (et un peu de repos aussi, à l'image d'Ulysse dans ce long voyage : il faut parfois savoir aborder un rivage !).

 

 

Le sommeil dans les chants V à XIII de l’Odyssée d’Homère

 

 


Ø      Si une telle question vous arrive, c’est-à-dire très précise, je conseille vivement de partir d’un inventaire du texte : qui dort ? qui rêve ? où ? quelles conséquences ? quel sens peut-on donner à chaque fois au sommeil ? Et de construire, à partir de la liste obtenue, ensuite un plan cohérent et analytique.

Ø      Néanmoins, voici un plan détaillé de la question.

 

On peut rappeler en introduction la perception que les Grecs de l’Antiquité avaient du sommeil et des rêves : les rêves viennent des dieux et peuvent même permettre de passer d’un monde à l’autre. Cependant, cette perception se fonde essentiellement sur l’Iliade et l’Odyssée, et a été reprise par les grands tragiques grecs par la suite. Ce n’est qu’à l’époque moderne avec les découvertes de la psychanalyse que les hommes abandonnent cette perception religieuse des rêves pour y voir l’expression de l’inconscient et de pulsions ou désirs refoulés.

 

On pourra se demander s’il y a un seul type de sommeil ou au contraire des sommeils différents. S’agit-il ainsi d’un sommeil appartenant au rythme humain ou au contraire d’un sommeil magique relevant du merveilleux ?

 

I – La fonction narrative du sommeil

 

1.1 ) Rythmer la narration

 

Le sommeil permet de rythmer la narration, aussi bien à travers les faits racontés par l’aède narrateur omniscient que au sein du récit d’Ulysse. Les formules désignant le sommeil et le réveil sont ainsi récurrentes et marquent autant d’étape dans la narration et le voyage d’Ulysse. L’expression « lorsque parut la fille du matin, l’aube aux doigts roses » est particulièrement répétée. Le sommeil vient ainsi clore le chant VII et le premier jour d’Ulysse au palais des Phéaciens. Au chant IX, le sommeil rythme également les différentes étapes de la dérive des bateaux d’Ulysse à travers les îles sauvages fréquentées par les nymphes et les cyclopes. Il est de même au chant X puisque le sommeil marque la progression du voyage du pays des Lestrygons jusque chez Circé.

 

1.2 ) L’absence de sommeil : un élément déterminant pour l’appréciation de la durée des épisodes et le registre épique

 

Par opposition, l’absence de sommeil permet d’accentuer la notion de durée et la perception de l’effort consenti par le héros durant certains épisodes. Celui-ci apparaît ainsi comme un véritable héros dans des épisodes épiques où sa résistance va au-delà des normes humaines. Dans le chant V, au sortir de l’île de Calypso, Ulysse dérive pendant vingt jours seul sur son radeau puis au sein même de la mer. Aux chants IX et X, l’absence de sommeil dramatise l’angoisse devant un danger imminent : après le massacre des compagnons d’Ulysse par les Cicones (IX, v.74-75) et après le massacre des Lestrygons, lors de l’arrivée sur l’île d’Aiaté, île de Circé (X, v.142-143). Dans un effet de parallélisme, c’est aussi l’absence de sommeil qui est invoquée pour désigner la longue attente de Pénélope, au chant XIII, v.336-338.

 

1.3 ) Permettre l’action

 

Le sommeil, en représentant une perte de maîtrise, peut faire évoluer l’action. Ainsi, il n’est pas question de magie dans le sommeil de Polyphème le Cyclope. Celui-ci s’endort au chant IX parce qu’il est ivre du vin que lui a donné le rusé Ulysse : « Alors, tête en arrière, il tomba sur le dos ; / puis sa grosse nuque fléchit, le souverain dompteur, / le sommeil, le gagna ; de sa gorge du vin jaillit / et des morceaux de chair humaine ; il rôtait, lourd de vin » (v.371-375). Mais ce sommeil voulu par Ulysse va permettre à celui-ci de prendre le cyclope par surprise et de lui crever son œil. Il est dans les chants de L’odyssée un autre sommeil qui n’a rien de magique : celui d’Elpénor, le compagnon d’Ulysse qui cuve son vin et finit, mal réveillé par se tuer en tombant du toit du palais de Circé. C’est à lui qu’Ulysse rend ses devoirs funéraires au retour du pays des Cimmériens.

Dans tous ces cas, le sommeil paraît normal, une scansion de la vie et du voyage pour des héros dont il rappelle l’humanité. C’est un moteur puissant du voyage puisque c’est lui qui souvent oblige Ulysse et ses compagnons à faire halte et ouvre ainsi sur de nouvelles rencontres et d’autres aventures. Cependant, à ce sommeil normal s’ajoute un sommeil qui a l’air magique et qui ouvre sur le merveilleux.

 

II – Un sommeil magique

 

2.1 ) Un sommeil voulu par des dieux hostiles

 

Le sommeil d’Ulysse sur l’île du Soleil paraît surnaturel et voulu par les dieux – « je priai les dieux qui règnent sur l’Olympe. / Comme ils versaient un doux sommeil sur mes paupières, / Euryloque à mes gens conseillait un projet fatal. » (v.337-339) - : il permet aux compagnons d’Ulysse de tuer les troupeaux du Soleil et ainsi de commettre un sacrilège qui amène sur eux la malédiction des dieux et retarde encore le retour à Ithaque.

 

2.2 ) Un rêve prophétique ?

 

C’est Athéna qui envoie à Nausicaa un rêve, au chant VI. Celui-ci enjoint à la jeune fille d’aller laver le linge en vue d’un prochain mariage. On peut y voir là l’un des motifs propres à la littérature grecque antique : le rêve prophétique puisqu’effectivement Nausicca rencontre le lendemain Ulysse qu’elle juge digne d’être son époux et à qui Alcinoos propose sa fille en mariage. Cependant, si ce sommeil est bien magique, il reste que Nausicaa est la véritable victime de l’épisode des Phéaciens puisqu’elle voit partir Ulysse au chant XIII. Ainsi, il ne s’agissait d’une prophétie qu’en apparence, astuce créée par Athéna pour aider en réalité Ulysse.

 

2.3 ) L’ambivalence du sommeil : source de vie ou de mort ?

 

De fait, si le sommeil peut ouvrir sur un avenir possible, son effet est cependant ambivalent. Ainsi, il est souvent présenté comme indispensable à la vie et régénérateur. Au chant V, après le long périple en mer et la tempête, Ulysse peut enfin s’endormir en arrivant sur les côtes de la Schérie. Ulysse endormi sous les feuille est ainsi présenté comme une source de vie préservée, un tison sous la cendre, v.488-491. Néanmoins, le sommeil peut aussi déboucher sur la mort : il en est ainsi du sommeil d’Elpénor. De même, que penser du chant des Sirènes qui entraîne l’oubli de soi jusqu’à en mourir : enchantement, charme magique ou sommeil mortifère ?

 

2.4 ) Sommeil ou passage d’un monde à l’autre ?

 

C’est plongé dans un profond sommeil qu’Ulysse fait la traversée du pays des Phéaciens vers Ithaque au chant XIII. Ce sommeil est trop surprenant pour ne pas être magique : comment Ulysse peut-il faire une telle traversée sans s’apercevoir de rien, et être déposé sur le rivage d’Ithaque sans en avoir conscience.  On peut ainsi se demander si ce sommeil magique n’est pas en fait le passage du monde merveilleux auquel appartiennent pour une part les Phéaciens et le monde réel, celui d’Ithaque, des hommes et des prétendants. Le sommeil serait ainsi le mode de passage d’un monde à l’autre, et la traversée magique, sur les barques phéaciennes qui se dirigent à la pensée son mode d’expression métaphorique. Ainsi, le sommeil qu’appelle Ulysse au début du chant XIII est comparé au retour du laboureur le soir chez soi après une longue journée de travail et de peine : v.29-35 : « Ulysse / tournait souvent les yeux vers le soleil resplendissant, / souhaitant son coucher, car il ne songeait qu’au retour. / Comme un homme qui rêve à son souper, car tout le jour / ses bœufs vineux dans la jachère ont traîné la charrue, / voit avec joie s’éteindre la lumière du soleil / et le souper venir, ses genoux cassés par la marche, / ainsi Ulysse eut joie à voir se coucher le soleil. » Paradoxalement, ce sommeil magique est associé à une mort, mais c’est surtout une mort aux peines endurées et une renaissance au réel. Ainsi, le sommeil est donc une étape majeure dans le parcours initiatique d’Ulysse puisqu’à travers lui le héros quitte les ténèbres du monde archaïque et merveilleux pour retourner au monde réel : v.78-81 : « Les rameurs, se cabrant, éclaboussèrent d’eau les rames ; / alors, un doux sommeil tomba sur ses paupières, / profond et tout pareil au calme de la mort. », et v.89-92 : « emportant ce héros sage comme les dieux / qui avait tant souffert d’angoisses dans son cœur / dans la bataille humaine et dans la douloureuse houle : / il dormait immobile, toutes souffrances oubliées ».

 

2.5 ) L’Odyssée : le rêve d’Ulysse ?

 

Il est ainsi à noter que l’essentiel des aventures d’Ulysse appartiennent à son récit. Comment ne pas être étonné devant cette narration qui nous plonge dans un monde merveilleux, si différent de celui d’Ithaque et de ses prétendants, où comme dans les rêves, les symboles du masculin et du féminin sont assez visibles : grottes, île nommée « nombril du monde » pour le féminin, pieux, lances, épées pour le masculin. En d’autres termes, ne peut-on pas émettre l’hypothèse que le récit du voyage tout entier serait le rêve d’Ulysse, dont il se réveillerait, comme par hasard, sur les rives d’Ithaque, pour ensuite aller rejoindre son épouse ?

 

 

On voit ainsi qu’il y a deux types de sommeils dans l’Odyssée : d’une part le sommeil indispensable à la vie, qui rythme le voyage et donc la narration, et qui rappelle la profonde humanité du héros comme aussi, par son absence, le caractère exceptionnel de l’endurance dans des épisodes épiques. Et puis, il y a aussi un sommeil magique, voulu par les dieux, qui ouvre sur le merveilleux ou au contraire le referme : il prolonge la dérive d’Ulysse dans le monde merveilleux et archaïque, permet à Nausicaa de rencontrer et d’aider Ulysse ou au contraire le fait revenir eu monde réel, dans une traversée qui est avant tout un passage, un rite dans le parcours initiatique du héros.

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12 juin 2010 6 12 /06 /juin /2010 11:00

Bonjour à toutes et à tous. Vous trouverez dans les pages à droite l'étude du roman de Hamm. Faites des fiches, révisez bien mais pensez aussi... à dormir. C'est indispensable pour aller au bac dans de bonnes conditions. J'espère que votre moral ne sera pas aussi changeant que le temps !

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 17:20

Ouvrons le blog sous le hospices d'Oscar Wilde. Tout le monde connaît The Picture of Dorian Gray mais ses poèmes sont moins connus :

 

"Before the dividing of days

Or the singing of summer or spring

God from the dust did raise

A spledid and goodly thing :

Man - from the womb of the land,

Man - from the sterile sod

Torn by a terrible hand -

Formed in the image of God.

But the life of man is a sorrow

And death a relief from pain,

For love only lasts till tomorrow

And life without love is vain."

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